Sortant tout embaumé d’un salon de coiffure,
Un pou s’examina sous toutes les coutures,
Et jugea le travail du figaro joli,
Bien que par sa tonsure il ait perdu son nid.
« La tête que j’avais ne me revenait pas.
Mon hôte a eu raison de se tondre aussi
ras ! »
Se disait notre pou, tout alors que derrière
Un paon se présentait d’orgueilleuses
manières :
« Êtes-vous le garçon du salon de
beauté ?
En voyant votre tronche, on pourrait en
douter. »
Déclara le bellâtre au pou condescendant,
En vieil habitué des quolibets vexants :
Parlant de sa disgrâce, il n’en avait que
faire.
Qu’on l’appelât poupou n’était que secondaire.
Il vivait tout cela à la poulidorienne,
En se satisfaisant de terminer deuxième. (1)
(Ses cousins, les morpions, se nichant au
pubis,
Lui ôtaient la faveur qu’on le nomme Adonis.
(2))
Mais ce gallinacé, ce fier-à-bras à plumes,
Venait tout bonnement lui tailler un
costume !
« Je viens d’inaugurer, lui ment alors le
pou.
Veuillez vous installer, je m’occupe de vous ! »
La queue en éventail, notre oiseau
fanfaronne ;
Il pose avec dédain son auguste personne
Sur les cuirs d’un fauteuil qui n’a pas dans
l’usage
De recevoir les culs d’un si vaste plumage.
Pendant ce temps le pou a pris la possession
Du crâne de la bête où les poils sont légion.
Se donnant par là même un nouveau domicile,
Une revanche, aussi, sur celui qu’horripile
L’idée de se gratter les poils de la tignasse,
(3)
Lui, un si bel oiseau, né de si noble race.
« À vouloir me chercher (4) vous m’avez
bien trouvé !
De la parade, soit, mais sans la
vanité. »
Lui rappelait le pou de façon quotidienne,
Juché sur les hauteurs de sa boîte crânienne.
On peut être au courant, et pourtant se moquer,
Du malheur qui advient aux plus déshérités.
Mais vivons avec eux leurs moments de misère,
Alors, nous remettrons vite les pieds sur
terre.
(1) Veuillez me pardonner pour cette pauvre
rime,
Mais le coup le valait ; soyez donc
magnanimes !
(2) Car ce brave Adonis c’est l’Anquetil des
Dieux !
Du moins, je le précise, au gotha des
pouilleux.
(3) Ces poils dont on a dit, par jugement
hâtif,
Qu’en restant dans le vent, ils sont
décoratifs.
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