Le sanglier gaulois



Un sanglier gaulois chaussé d’une casquette
Avait peur que le ciel lui tombe sur la tête.
Il respectait ainsi, pour leur faire plaisir,
Ancêtres et parents qui, craignant de mourir,
S’étaient attribué ce vêtement loufoque
Pour conjurer un sort à la mode à l’époque. (1)
Or, voyant le progrès avec circonspection,
Il nouait des liens forts avec la tradition.
Le sanglier vivait avec sa belle-mère
Qui se moquait souvent de son paratonnerre.
Elle allait à la grotte avec le marcassin
Dans le but avoué d’on ne sait quel dessein,
Et le menait aux champs, même par temps maussade,
En grognant : « Crâne nu n’est pas une bravade !
Comment cette casquette a rapport au trépas ?
Sommes-nous foudroyés, nous qui n’en portons pas ? »
Le sanglier gaulois, qui la traitait de cloche,
Avait plusieurs raisons de haïr belle-doche.
Or, un jour où le temps se montrait menaçant,
Il s’enfuit vers la grotte, et, en y pénétrant,
Découvrit le portrait du Seigneur de l’orage
Un éclair à la main, et dans l’autre un fromage. (2)
« Ainsi ma belle-mère avec le marcassin
Viennent se cacher là pour faire du dessin !
Je dois la supplicier pour un pareil oukase.
La goutte que voilà fait déborder le vase ! »
L’idée de la punir étant déjà dans l’air,
Il raconta partout le coup du camembert,
Puis rassemblant les purs qui suivaient sa croyance,
Suggéra qu’on devait la mettre en pénitence.
Comme il fut décidé qu’elle soit mise au ban,
D’une lapidation, elle partit du clan.
Plus tard, le sanglier menait à la baguette
Sa laie, son marcassin, qui portaient la casquette,
Et par peur de subir la même punition,
Chacun se convertit à cette confession.
Tandis que dans la grotte où peignait l’hérétique,
On tentait d’effacer le dessin satirique.


Une caricature appuie sur les défauts :
Elle prêche le vrai pour débusquer les faux.

(1) Si dans le coin traînait un certain Obélix
Il est un fait certain qu’ils couraient tous un rix.

(2) En Gaule où l’on admet toute caricature,
On ne plaisante pas avec la nourriture.

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