Le pire des piranhas



Au sein du Maroni, dans la jungle Guyane
Croisait un piranha doucement mythomane,
En cela qu’il contait d’improbables exploits
Du haut d’un grand perchoir muni d’un porte-voix.
Il avait depuis peu, d’une histoire nouvelle,
Attiré par ses chants une foule fidèle
Qui se réunissait pour reprendre ses mots,
Comme un karaoké d’un chanteur pour ados.
« Chers amis, braillait-il, pour le bien de la race,
J’ai dévoré cet homme et rongé sa carcasse !
Et quand vint le second, qui voulait se venger,
Je lui ai fait si peur qu’il s’est découragé.
Je me suis assuré juste après ces carnages
Qu’aucun autre lascar ne traînait aux parages. »
Les fidèles émus du chant du piranha
Le furent deux fois plus quand il leur rajouta :
« Il est temps de montrer à l’engeance extérieure
Qui est, entre nous deux, la race supérieure ! »
Le visage étonné de chaque spectateur
Reflétait à l’instant leur extrême stupeur,
Mais on nota bientôt un changement de taille
Prouvant que l’on prisait ce cheval de bataille,
Et que le porte-voix de ce chef honoré
Porterait tout autant un honneur retrouvé.
L’ennemi récrié par ces foudres divines
Servirait de prétexte à des troupes chauvines
Pour pouvoir s’inventer de nouvelles vertus
Et se croire sur tout et sur tous en dessus.
« Le fleuve aux piranhas ! Expulsons le bougnoule !
À mort les étrangers ! » scandait en chœur la foule.
En donnant et criant le sus et le haro,
D’une chanson de geste on se faisait l’écho.

Une idée à la con, la méthode Coué,
Un bon ampli dessus, et le tour est joué.

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