Le phoque en Grèce



Sur l’île Mykonos, était un phoque en graisse
Se goinfrant chaque jour sa grosse bouillabaisse.
Il croisait des jaloux se montrant belliqueux,
Lui conseillant d’aller se faire voir chez eux.
« Tu chasses, râlaient-ils, le poulpe à tentacule !
Va-t en chasser après les colonnes d’Hercule ! »
« Sais-tu, rajoutaient-ils, le mâle que tu fais ?
Tu commets, par ce vol, le pire des forfaits !»
Or, lui, le Monachus de cette mer Égée,
N’avait aucun désir de cesser sa plongée.
Il ne faisait plus cas de ces piètres assauts ;
Laissant hommes entre eux, il les traitait de sots.
Ces sots d’hommes pourtant, poursuivaient leur étoile
Sur d’énormes rafiots, à vapeur ou à voile.
Un soir dans leurs filets, merci Poséidon,
Un phoque fut tiré, beau comme un Apollon.
C’était le premier qu’on connut dans les annales,
Mais sans trop paniquer, sans perdre les pédales,
On sut échafauder un subtil procédé
Pour se débarrasser de l’autre phocidé.
Celui-ci dont on sait, concernant l’amourette,
Qu’il n’a pas de souci d’enfiler la jaquette,
Voit un soir un égal, aussi gros qu’un poussah,
Croisant non loin du bord de la mer Thalassa.
Or, cette mer étant la mère d’Aphrodite,
Le gay phoque rugit qu’en ces eaux il habite ;
Mais l’autre ne vient pas, car les pêcheurs du coin
Le tirent vers le large, et même un peu plus loin.
Le phoque le suivit d’un trajet homérique
Tombé dorénavant dans le mythologique.
La légende, depuis, dit que sur Mykonos
Les phoques sont placés sous l’égide d’Éros.

Commentaires