Les fièvres du vautour




Profitant d’un décret qui ouvrait les frontières
Au négoce et marché, fondant sur la misère,
Un vautour s’envola trouver des intérêts
Sur les nouveaux virus et leurs contre-effets.
Il n’aurait plus après, devant sa clientèle,
Qu’à demander le dû de ses battements d’ailes.
Ce libre-échange avait un côté libéral
Fortement inspiré par le règne animal ;
Avec chacun pour soi, et Dieu pour tout le monde,
En devise sacrée, en réflexion profonde.
(Chacun pour soi, bien sûr, pour ceux qui le pouvaient,
Et Dieu, qui a bon dos, pour les ceux qui restaient.)
Pour vendre ses produits, notre vautour dut faire
Une démonstration en face d’un parterre
De poulets d’élevage alimentés de grains
Qui leur donnaient des airs de poulets surhumains ;
Mais leur donnaient aussi de sérieuses lacunes
À combattre un virus qui, sans lâcher leurs thunes,
Les infesterait tous de par sa nouveauté.
Comme quoi notre oiseau avait bien calculé.
La grippe eut le poulet, ou peut-être l’inverse,
Mais en tout cas ça fit fonctionner le commerce :
« J’aurai, dit le vautour, bientôt l’antivirus.
Il est en cours d’essai sur un anti fœtus.
La recherche serait un peu moins trébuchante
Si vous saviez lâcher vos espèces sonnantes. »
On finit par céder, et ce, pour deux motifs :
Avoir peur de mourir et d’en être fautif.
Mais malgré tout, on eut la sensation profonde
Que ressent le patient qu’on soigne avec la sonde.
On réunit alors tous les poulets savants,
Afin qu’ils trouvent eux-mêmes un vrai médicament. (1)
Cela leur prit du temps, mais lorsqu’ils le trouvèrent,
La somme demandée était encor plus chère
Que celle que l’oiseau avait pu escroquer.
Si bien qu’on ne sut plus comment se protéger.
Or, un jour, ce vautour, en croisant un canard,
L’apostropha de loin sur un ton nasillard :
« N’as-tu jamais pensé que cette grippe aviaire
Qui touche les poulets pourrait toucher tes frères ? »
« Tu peux te faire voir, le canard répondit.
On n’a pas de poulets, mais des cochons ici. »
« Alors, mon bon ami, voilà la médecine
Qui pourrait te sauver de la fièvre porcine ! »

(1) Or aucun pharmacien ne produit d’élixir :
Il préfère soigner plutôt que de guérir.
Trois cachets au lieu d’un ça vous remplit les caisses,
Et c’est donc un moyen de protéger l’espèce !

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