Le pinson garou



Il était né le soir dans un bon nid douillet,
Doté d’un cri perçant et d’un léger duvet,
Et en ce soir couvert, où la lune était ronde,
Il devint la fierté de tout son petit monde.
Chacun s’émerveilla devant cet oisillon ;
On vint le survoler de larges tourbillons,
Puis chacun fit un vœu d’heureuse et longue vie :
Augures de bonté, de tendresse infinie.
Or, moins d’un plus tard, même pas un soupir,
Il fallut lui trouver un nouvel avenir.
Car en ce jour maudit, en ce jour d’infortune,
En ce jour où la nuit reçoit la pleine lune,
Ce petit rejeton qu’on avait dit charmant
Se transforma soudain en un monstre géant.
N’essaye pas, lecteur, d’imaginer le pire.
C’est, malheureusement, tout ce que je peux dire.
Mais sache cependant qu’il inspira la peur
À tout cet alentour qui voulait son bonheur :
Chaque pinson s’enfuit au milieu de la brousse,
Tirant d’aile aussi loin qu’était grande sa frousse.
Il en fut toutefois qui, dès le lendemain,
Retournèrent au nid pour tâter le terrain.
À leur grande stupeur l’oisillon, dans sa couche,
S’avérait y ronfler, dormant comme une souche.
On tint alors conseil où parents et amis
Durent fixer le sort réservé au petit,
Et où l’on vit trois clans justifiant leurs plaintes
Proportionnellement au niveau de leur crainte…
N’ayant pas su trancher que faire du garou,
S’il convenait ou pas de lui trancher le cou,
On admit ses parents comme les responsables
Des dégâts provoqués par l’être abominable ;
Devant ainsi régler, en terme de caution,
Trois grains pour chacun d’eux lors des transformations.
Or, apparut un jour, un soir de pleine lune,
Quelqu’un pour redresser ce travers de fortune.
Me croiras-tu lecteur ? C’était un monstre hideux.
Si tu l’as cru pour l’un, crois-le donc pour les deux.
Et ce monstre croquait partout sur son passage
Tout animal vivant qui portait un plumage.
Or, le pinson garou, aussi monstre qu’il fut,
Vint défendre le clan dont il était issu.
Quand leur affrontement devint inéluctable
On en fit le combat entre Dieu et le Diable,
Et chacun fit le vœu de rapporter son grain
Si le saint des démons terrassait le païen.
Je n’en dirais pas plus, la suite de l’histoire
Procède à mon avis de l’art divinatoire…


Le bonheur des pinsons est un fait établi,
Mais le pourquoi du fait s’explique-t-il ici ?
Peut-être que leurs chants ne sont que les louanges
De ce pinson garou, devenu leur archange.

Commentaires