La planète des singes



Une meute de singes venait chaque matin
Chahuter dans les arbres au milieu du jardin
D’un homme soupe au lait qui, n’aimant ses aïeux,
S’était mis dans l’idée de capturer l’un d’eux.
Il voulait l’empailler pour qu’il serve d’exemple,
Afin que plus personne ne sévisse en son temple.
Il prépara un piège, assez rudimentaire,
Composé d’une cage et au fond le poster
D’un singe sur le trône, le journal déplié :
Ce poster qu’on peut voir dans tous les cabinets.
Ce que je ne crois pas du tout irrésistible
Mais qui, pour la capture, se montra infaillible,
Car un singe curieux s’engouffra dans la trappe,
Qui lui claqua au nez avant qu’il ne s’échappe.
« Ah ! se réjouit l’homme, en voyant la bestiole.
On va voir désormais si tu joues le mariole !
Aujourd’hui ma malice opposée à la tienne,
S’est soldé en victoire de la malice humaine.
Ce sera la leçon pour tes frères macaques :
Qu’ils cessent enfin chez moi de tramer leurs micmacs. »
Il verrouille la porte d’un bon gros cadenas
Et dépose la clef dans une véranda,
En cachette géniale dont il est l’inventeur.
Je vous la donne en mille : dessous le pot de fleurs !
Bien entendu, les singes ne mettent pas longtemps
À percer ce secret un peu trop évident.
Leur malice est notoire, mais ce que l’on sait moins,
C’est qu’ils ont pour le jeu des âmes de bambins.
Car ils ont repéré le matou du maton ?
Et vont pour s’amuser le jeter en prison.
Ils cadenassent ensuite le chat de l’empailleur,
Puis remettent la clé dessous le pot de fleurs.
L’homme se pétrifie, comme le sont ses oeuvres,
Car il ne comprend pas la fumeuse manœuvre.
Il cherche vainement, la colère à la clef,
Comment le chat, le singe, ont pu être inversés.
Et malgré les apports du génie qu’il s’affuble,
Ce mystère, pour lui, restera insoluble.


La malice n’est rien si elle est trop sérieuse,
Car, par définition, la nature est joueuse.

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