C’est l’histoire
d’une autruche qui, étant à Lisbonne,
Fait tomber ses
lunettes au fond de la Garonne. (1)
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » dit-elle à la personne
Expliquant que le
Tage ce n’est pas la Garonne ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » fait-elle à ceux aussi
Disant que la
Garonne, elle coule en Australie ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » répond-elle à celui
Qui en croyant bien
faire lui appelle un taxi ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » répond-elle au chauffeur
Qui aimerait savoir
où est-ce qu’elle demeure ;
« Oh moi sans
mes lunettes ! » rétorque-t-elle aussi
À ce même chauffeur
qui ne fait pas crédit ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » dit-elle au commissaire
Qui aimerait
connaître sa fiche identitaire ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » voilà ce qu’elle chuchote
Au gardien de
prison lui passant les menottes ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » explique-t-elle au juge
Qui dit que par ici
on ne fait de grabuge ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » confie-t-elle au bourreau
La guidant vers les
marches qui mènent à l’échafaud ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » dit sa tête qui roule
Face aux
acclamations provenant de la foule ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » dit-elle à saint Michel
Qui donne paradis à
des plus criminels ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » fait-elle à Lucifer
S’inquiétant de
savoir quelles flammes elle préfère ;
« Oh moi, sans
mes lunettes ! » dit-elle à sa conscience
Qui lui dit qu’elle
est sourde, ce depuis la naissance.
C’est pas parce
qu’on est sourd qu’il faut que l’on prétende
Qu’on a perdu la
vue dès qu’on vous réprimande.
Mentir, ce n’est
pas bien, mais se mentir à soi
Prouve le peu
d’estime qu’on a à son endroit.
Il ne faut surtout
pas, lorsque vient l’anathème,
Enfouir sa tête en
terre pour fuir tous les problèmes.
(1) C’est le début,
je sais, d’une histoire de Coluche,
Mais mon histoire à moi, c’est celle d’une autruche.
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